Nous ne pouvions pas venir à Biarritz sans parler du Pays basque. Ou plutôt, à Miarritze, comme ils disent par ici. Parce que le pays Basque, ce n’est pas qu’un département, une région et une identité, c’est aussi des réalisateurs, producteurs, qui se battent chaque jour pour encourager l’existence de projets documentaires. Rencontre auprès de ceux qui pensent le documentaire made in Euskadi.
Nous avons commencé notre enquête à la source. Nous voilà à Biarritz cœur battant du Pays basque français. Les panneaux bilingues sont légion et on s’habituerait presque à voir le basque avant l’anglais ou l’espagnol dans les guides et indications locales. Le 25 janvier, une manifestation pour la libération des prisonniers politiques parcourrait les rues de la ville, symbole de cette identité encore très présente.
Tout le monde connaît les bérets, le surf, le piment d’Espelette, la pelote basque, son gâteau à la crème de cerise. Mais qui pourrait citer un réalisateur basque célèbre ? Peu d’entre nous. Pourtant, le Pays basque est source d’histoires singulières. Sa langue, si particulière, en est déjà une. Le conflit qui a animé le territoire, en est un.
Il sert d’ailleurs de sujet au film L’hypothèse démocratique, pitché par Thomas Lacoste. Ce documentaire, prévu pour mai prochain, a pour but de retracer le conflit armé mené par l’ETA, de la guerre civile espagnole jusqu’à la dissolution de l’organisation en mai 2018. Le réalisateur a réussi à réunir des archives exclusives et des témoignages. « Mon but est fondamentalement démocratique », explique Thomas Lacoste. Il souhaite présenter « un moment unique de l’histoire » et ses aspects universels.
Ce documentaire a déjà reçu de nombreux soutiens financiers, notamment de la région Nouvelle-Aquitaine et du diffuseur Public Sénat. Produit par la société Prima Luce, basée à Bègles, ce documentaire sur la fin de la lutte armée est également coproduit par Sister Productions et Irusoin. Cette société, basée à San Sebastian est l’une des principales productions basques en Espagne. Elle a d’ailleurs produit récemment Loreak, un film sur l’histoire de trois femmes dont l’existence est bouleversée par un bouquet de fleurs. Mais parfois, de plus petits projets peinent à voir le jour et à être diffusé en dehors des frontières de l’Euskal Herria.
L’Europe au secours des créateurs basques
C’est là que les fonds de l’Union européenne interviennent. Ainhoa Gonzalez Sanchiz est responsable du bureau Media du programme Europe créative au Pays basque. Basée à San Sebastian, elle aide depuis plusieurs années les réalisateurs basques à développer leur projet, que ce soit en français, en espagnol ou évidemment en basque.

Chaque année, ce sont entre 800 000 et un million d’euros qu’elle distribue au travers d’aides et de formations. Un budget dont elle est très satisfaite. Il provient à 50 % de la Commission européenne et à 50 % de Zineuskadi, le programme de soutien culturel du gouvernement basque. « Notre rôle est de conseiller les professionnels basques à propos de toutes les possibilités et les offres du programme MEDIA ». Un programme dont a pu bénéficier le film Loreak.
Que ce soit pour les producteurs, tous les membres de la chaine de production qui aident au développement du projet, le rôle de ce bureau est d’aiguiller les créateurs vers les formations et les marchés existants parmi tous les festivals européens. « Nous multiplions les ateliers de formation pour les aider à préparer leur dossier de candidature pour des aides financières », explique-t-elle.
« Notre but, c’est véritable de créer un réseau entre tous les artistes. De leur permettre de découvrir toutes les aides et formations auxquels ils ont accès. On ne donne pas de financements directs, mais nous aidons ce qui en besoin à identifier les acteurs qui pourront leur en offrir ». Ce bureau, créé en 1998, n’est pas le seul du genre en Espagne, puisque des antennes existent également à Séville, Madrid et Barcelone. L’Espagne est l’un des rares pays européens à avoir ces antennes régionales, justifiées par de fortes identités locales. À titre comparatif, la France ne dispose que de deux antennes, à Paris et Strasbourg.
Un speed dating fructueux pour la représentante du bureau Media, puisque plusieurs producteurs se sont montrés intéressés. Parmi eux, Alfredo Torrecalles, de Fascina producciones, société basée à San Sebastian. Producteur, il est également journaliste et a déjà réalisé de nombreux documentaires. Il s’est montré très satisfait des rencontres faites durant le Fipadoc. Un constat partagé par Ainhoa Gonzalez Sanchiz : « j’ai connu des producteurs français intéressants pour les basques. Je n’étais pas venue depuis des années, je suis très contente de l’organisation ». Sa venue lui permet d’entrer en contact avec les productions de l’autre côté des Pyrénées. Elle pourra ensuite trouver des coproductions et par exemple avoir ainsi accès « aux aides françaises du CNC ou de la région Nouvelle-Aquitaine ». Les projets basques ont encore de beaux jours devant eux.
Marianne Chenou
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