Deux écoles. Deux pays. Une exposition. Cette année encore le FIPADOC accueille des élèves de l’Ecole Supérieure d’Art du Pays Basque et de son homologue allemande la Kunsthochschule Kassel. Leur exposition commune questionne la notion de frontière autour d’un thème : « Débordement ou Überlaufe ».
Dix-huit heures, le sous-sol du Casino municipal se remplit pour le vernissage. Ce mardi 18 janvier 2022, les étudiants basques et allemands vont enfin pouvoir présenter en France leurs œuvres créées autour d’un thème : le débordement. Les élèves de l’Ecole Supérieure d’Art du Pays Basque de Biarritz et de la Kunsthochschule Kassel ont conjointement choisi ce thème aux cours d’échanges linguistiques et artistiques entre les deux universités. Ces séjours ont mené à une première exposition outre-Rhin en novembre dernier. D’où est venue cette idée ? Jan Emde, étudiant de Kassel, ne le sait plus vraiment : « C’est venu au fil des discussions, on voulait travailler sur l’idée de frontières, de barrières à la fois physiques et morales ».
Un flot débordant d’idées créatrices
De la frontière franco-espagnole à la séparation entre Berlin Est et Ouest, sans oublier les barrières corporelles, les jeunes artistes se sont emparés de la multitude de concepts que recouvre le débordement. De la photo, de la vidéo, de la peinture ou encore des installations, chaque élève s’est exprimé avec une technique personnelle.
Par une superposition de photographies argentiques de deux villes allemandes, chacune situées d’un côté de l’ancien rideau de fer, l’étudiant artiste Venus Kaiser vient brouiller sur une unique pellicule les perceptions des différences entre les anciennes RDA et RFA. « En choisissant de ne pas nous dire de quelles villes il s’agit dans l’œuvre, la photographe a voulu aller à l’encontre des préjugés que l’on peut avoir sur l’ex-Allemagne de l’Est, notamment les clichés qui présentent cette partie de l’Allemagne comme moins développée et moins esthétique», confie son camarade Jan.
Une exposition transfrontalière et évolutive
Là, l’idée de frontière ou de débordement peut être plus subtilement distillée dans le processus créatif. Élève en quatrième année à Kassel, Jan Embe a choisi de présenter une photographie longue exposition d’un rocher vu depuis le phare de Biarritz en pleine nuit. « En fermant au maximum le diaphragme pendant trente secondes, le faisceau lumineux du phare est passé plusieurs fois sur le rocher, l’inondant dans le flot de lumière » explique-t-il. N’ayant pas pu ramener la photo dans son cadre original, l’artiste allemand à du repenser l’exposition de sa photo. « En l’imprimant sur un long papier glacé déroulé à la verticale, je me suis dit que je pouvais faire déborder la photo sur le sol. Finalement je trouve cette nouvelle installation plus intéressante. »

L’œuvre doit s’adapter au lieu d’exposition. Nour Asran a dû repenser la disposition de sa création. A Kassel, le jeune biarrot avait suspendu une bâche en plastique au plafond et déversé un pot de peinture blanche liquide dessus. Il avait ainsi créé « une œuvre mouvante et charnelle qui se modifiait avec le temps en séchant ». Toutefois, à son arrivée dans le sous-sol du Casino, l’étudiant français n’a pas pu accrocher sa réalisation au plafond. Il a donc choisi de la poser sur une barrière, représentation physique de la frontière.
Traverser les frontières, briser les barrières pour se laisser porter par la création. Débordement/Überlaufe reste une collaboration artistique et humaine marquante pour ces artistes en devenir.
Lucas Zaï–Gillot
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