Focus Allemagne

« Island of the hungry ghosts »: voyage confus au pays des crabes

 

Un territoire hors du temps, hérissé de crêtes battues par les vagues. Gabrielle Brady, réalisatrice australienne d’Island of the hungry ghosts produit notamment par Chrosmom Film Germany, suit le parcours d’une psychologue accompagnant les demandeurs d’asile sur l’île Christmas, à des centaines de kilomètres de la province de Java occidental. Poétique mais décousu.

Effrayante, mystérieuse, emprunte de spiritualité. L’île Christmas paraît renfermer dans ses forêts, sur ses plages, le murmure des « esprits vivants » qui peuplent ce territoire extérieur australien. Ici, à l’extrémité du monde, les crabes migrent de la forêt à la mer à la saison des pluies. Une vague rouge, mouvante, affrontant obstacles et entraves pour arriver à leur terre promise. Un exode faisant écho à l’arrivée de centaines de demandeurs d’asile arrivant sur l’île Christmas. Ils sont admis dans un centre, dans des conditions de vie laborieuses, le temps que leur demande d’asile soit instruite. Ce centre a d’ailleurs fermé ses portes en octobre 2018.

Dans « Island of hungry ghosts » Gabrielle Brady suit Poh Lin Lee, travailleuse sociale australienne apportant une aide psychologique à ces demandeurs d’asile qui ont subi le pire. Lors de longues scènes du film, Poh Lin écoute, panse, et questionne la peur, l’abandon, la solitude. Le film suit aussi son quotidien, sa vie de famille avec son mari français Arthur Floret et leurs deux petites filles Poppy et Albertine, entre promenades dominicales et camping sauvage.

Le film se poursuit, Poh Lin supporte de moins en moins la misère humaine à laquelle elle fait face chaque jour. « Qu’aurais-je fait à sa place ? Aurais-je lâché prise ? Me serais-je laissée mourir ? », souffle Poh Lin à son mari en lui racontant un de ses entretiens avec un réfugié, ayant frôlé la mort après le naufrage de l’embarcation qui le transportait.

Un puzzle, poétique mais chaotique

De beauté, Island of hungry ghosts n’en manque pas. Aux plans fixes de bord de mer, succèdent les plans fixes des étendues rocheuses de l’île. On voit un couple asiatique se recueillir autour de tombes dans la forêt, une femme courir dans la rue pour se jeter à l’eau. Des scènes qui s’étirent en longueur, jusqu’à perdre le propos. Un documentaire qui aurait sûrement gagné en profondeur en s’éparpillant moins, en se concentrant sur l’essentiel, avec des scènes plus courtes, plus percutantes. « Island of hungry ghosts » tombe dans un piège qu’il s’est lui-même tendu : pour faire profond, faire trop long.

Les séquences se suivent parfois sans grande cohérence, voulant à la fois traiter la spécificité de ce territoire reclus du monde et sa culture, la détresse profonde ressentie par ces demandeurs d’asile en quête d’un avenir meilleur, le parcours d’une travailleuse sociale et sa famille. A l’issue des 1h36 que dure le documentaire, à la question « que raconte le film ? », le spectateur ne sait finalement plus quoi répondre. Un manque de rythme et de cohérence, qui handicape ce microcosme délicat qu’est Island of the hungry ghosts.

Océane Théard

 

 

 

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